A la maison du Barret, au début des années 1950, l’installation électrique qui datait de 1927 ou 1928 était restée exactement dans son état d’origine. Il y avait trois « lampes », c’est-à-dire trois ampoules, une à la cuisine, l’autre dans la chambre du bas, la troisième dans l’écurie. Pas de prise de courant : en cas de besoin on avait recours à une « douille voleuse », une sorte de culot en buis que l’on insérait dans l’une des douilles au plafond, en lieu et place de l’ampoule électrique. Ce culot envoyait le courant dans la prise en porcelaine située à l’autre bout des quelques mètres de fils torsadés qui complétaient le dispositif. Une espèce de « rallonge », peut-être bricolée sur place pour un usage plus ou moins exceptionnel car la maison ne disposait d’aucun appareil électrique. Une maison dans laquelle il n’y avait pas de prise mais où, placé bien évidence et à bonne hauteur dans l’embrasure de la fenêtre, trônait ce que l’on appelait à tort « le chalumeau ». Branché sur le secteur, cet « allumoir » – c’est là semble-t-il le terme usuel – comportait deux peignes métalliques entre lesquels on passait « l’allumette », également métallique, légèrement imprégnée de pétrole à brûler ou d’alcool. On devine la suite : le frottement produisait des étincelles qui enflammaient l’allumette, et l’on pouvait alors s’en servir pour allumer sa pipe ou une cigarette ou, très couramment, le papier journal destiné « éclairer le feu » dans le poêle ou la cheminée. Dans certaines familles, on parlait de « briquet » ou de « frottoir ». Un ustensile dangereux dont on se méfiait. Son utilisation a été progressivement abandonnée pour disparaître après le passage de 110 à 220 volts, généralisé en France à partir du milieu des années 1950. « L’allumoir » fait aujourd’hui partie de ces objets du quotidien que l’on conserve comme témoignage du passé.
Michel Jolland